Parmi tous les effets néfastes de la COVID-19 (et malheureusement, c’est encore à mettre au féminin d’après l’OMS, comme les ouragans !), il y a un dommage collatéral qu’il faut bien constater : à cause de ce virus, que nous soyons infectés, asymptomatiques ou tout à fait sains, nous sommes tous devenus sourds !
Sourds ? Certains plus que d’autres, car ils n’entendent plus la voix de la raison parce que ballotés d’une information à l’autre, vraie ou fausse, y perdant leur bon sens et leur latin. Quand une personne est gouvernée par la peur remontant de l’enfance, il faut savoir que c’est son enfant intérieur qui se manifeste, terroriste terrorisé qui perd tout jugement et s’enfonce dans la peur qui est l’inverse du bon sens. Ne pas confondre « l’âme d’enfant » (capacité à s’amuser et s’émerveiller) qui est précieuse, avec « l’enfant intérieur » (qui rime avec peur). Ce dernier tire à boulet rouge sur tous les bons arguments, chérissant les mauvais, alimentant ses terreurs. Evidemment, quand vous vous inscrivez dans le négatif, devinez ce que vous attirez ? La situation est assez compliquée pour chacun, voire dramatique pour une partie de la population, point n’est besoin d’en rajouter.
Sourds ? Nous le sommes tous devenus parce que nous ne nous entendons plus du tout à cause du masque ! J’imagine que, comme moi, vous faites répéter et on vous fait répéter (surtout avec mon accent parisien, au Québec !), le morceau de tissus ou de papier que nous avons sur la bouche nous empêchant de correctement nous exprimer. Découragée, quand je dois demander un conseil à un commerçant (en particulier dans un magasin de rénovation), je préfère l’écrire sur un papier, car le réflexe, quand on ne vous comprend pas, c’est de faire tomber le masque, afin que votre interlocuteur voit vos lèvres bouger. Personnellement, je suis habituée de par mon métier de coach à observer tous les mouvements du visage, quand on me parle : me voilà sacrément handicapée, car je ne peux, comme nous tous, me concentrer que sur les yeux. Et je songe tout particulièrement à ceux qui sont malentendants, coupés du monde qu’ils sont. Je suis allée me faire masser et figurez-vous que j’ai confié mon corps à une jeune femme que j’allais voir pour la première fois et que je ne serai pas capable de reconnaître, quand je la croiserai au supermarché du village, pas plus qu’elle ne le pourra. A moins qu’elle m’entende parler, si elle réussit à m’entendre… J’ai confié mon corps à une totale inconnue que je ne connais toujours pas puisque je n’ai jamais vu son visage. J’ai également dû la faire répéter plusieurs fois, quand elle m’a énoncé toutes les consignes de sécurité qu’elle respecte, et c’est tout à son honneur et pour notre sécurité, à la lettre.
Evidemment, nous parlons sur le même ton, oubliant notre bâillon. Car, même s’il n’est pas collé à notre bouche, il en obstrue les sons. Bien heureusement isolée sur mes 90 acres/37 hectares à St-Jean-de-Matha, je n’ai pas souvent besoin de parler masquée puisque la pandémie m’oblige à travailler prioritairement par Skype. Ce qui fait que je ne suis pas habituée à hausser le ton, quand je sors de chez moi : donc, je n’arrête pas de répéter ! Et vous, avez-vous appris à parler plus fort ? Crierons-nous les uns sur les autres, une fois la pandémie terminée, oubliant que nous ne sommes plus masqués ? En tout cas, nous évitons les rides d’expression autour de la bouche, car il suffit de plisser les yeux pour faire croire que nous sourions. Car, moi qui souris souvent, je me rends compte que je perds mon temps, car personne ne le voit ! Le bon côté des choses, c’est que portant un traitement d’orthodontie (des gouttières en plastique), personne ne s’en rend compte, mais je suis, une fois de plus, handicapée pour articuler et me faire comprendre correctement : je zozote ! Je passe un peu (auprès de ceux qui ne me connaissent pas !) pour une débile qui ne réussit pas à articuler et qui parle doucement. Sincèrement, ça me fait plutôt rire et là, au moins, si on ne voit pas mon beau sourire, on m’entend rire ! J’ai également une amie qui est ravie de porter le masque, car ça lui évite de mettre ses deux dentiers qui la font souffrir horriblement. Elle aussi, en revanche, est obligée de parler fort et de bien articuler.
Voilà, maintenant vous comprenez pourquoi la COVID-19 nous rend tous sourds : elle rend difficile la communication, sans compter qu’on nous retire petit à petit nos interlocuteurs, puisque ceux avec lesquels nous pouvons parler sans masque ont de moins en moins le droit de venir nous voir ou nous d’y aller. Mon père devenait un peu sourd avant d’être emporté, au jeune âge de 63 ans, par un cancer : quand il ne comprenait pas, il ne voulait plus faire répéter et renonçait donc à certaines parties de conversation. Je suis devenue comme lui : j’en ai parfois assez de faire répéter, alors, comme quand on apprend une langue étrangère et qu’on sourit en faisant semblant d’avoir compris, c’est ce que je fais, sauf que personne ne voit le sourire qui veut faire croire que j’ai entendu. M’entendez-vous ? La COVID-19 rend sourd !
www.pascalepiquet.com