session sabbatique ou acharnement académique?

En tant que conseillère d’orientation, j’ai rencontré plusieurs adolescents et discuté avec plusieurs parents. Au fil des années, je me suis aperçue que pour plusieurs parents, le plus important est que le jeune aille à l’école… peu importe ce qu’il y fait réellement. En effet, ces parents semblent vivre une angoisse profonde à l’idée que leur enfant cesse leurs études sans avoir de formation professionnelle. Aussi, ils ont peur que si leur jeune cesse d’aller à l’école, qu’il y décroche à jamais. Pour ces parents, un arrêt, même temporaire, des études est donc très risqué. Cette peur les amène à obliger leur adolescent à débuter des études collégiales et ce, même s’il n’a aucune motivation et aucun projet professionnel. Je suis convaincue que ces parents pensent agir pour le bien de leur enfant. Malheureusement, je suis d’avis que certains d’entre eux leur font au contraire bien du tord.

 

En effet, plusieurs de ces étudiants commencent la première session au cégep avec plein de bonne volonté, mais faute d’avoir un objectif professionnel auquel se raccrocher, ils perdent rapidement leur peu de motivation. Ainsi, ils «démissionnent» tranquillement. Ils arrivent en retard à leurs cours,  prolongent les pauses, oublient de se lever un matin, omettent de faire certains travaux et d’étudier, pour finalement cesser complètement d’aller à un ou plusieurs cours. Ils finissent donc obtenir de mauvaises notes et/ou récolter un ou des échecs. De session en session, ces jeunes qui sont «obligés» de se réinscrire, «font du temps» et promettent de faire mieux à la session suivante. Certains se promènent d’un programme à un autre sans plus de motivation. Toutefois, les bonnes résolutions tombent de plus en plus rapidement et les sessions se succèdent avec une collection grandissante de notes faibles et d’échecs… Et là, commencent les vrais problèmes!

 

Et oui, alors que les parents voient comme la fin du monde un arrêt de six mois ou un an, cela a, dans les faits, très peu de conséquences sur une carrière de plus de 40 ans.

 

Or, une seule session échouée peut avoir un impact désastreux sur la carrière du jeune puisqu’elle peut l’empêcher d’être admis dans le programme qu’il aura finalement choisi en raison de sa faible cote R (code de rendement). De plus, les jeunes qui font une collection de mauvaise notes et d’échecs voient leur confiance en soi diminuer. Enfin, ceux qui se sont promenés d’un programme à un autre voient finalement leurs amis partir pour des études universitaires ou sur le marché du travail alors qu’eux sont encore sur les bancs du cégep, sans diplôme ni projet précis… Tout ceci affecte leur motivation déjà faible.

 

Votre jeune ne sait pas en quoi se diriger et ne veut pas aller au cégep? Ne vous imaginez pas qu’une session ou deux au cégep va automatiquement lui donner une révélation. Arrêtez de faire de l’acharnement académique! Acceptez le fait que votre enfant a peut-être besoin d’un temps d’arrêt pour découvrir ce qu’il veut faire. Invitez-le à rencontrer un conseiller d’orientation. Permettez-lui d’aller travailler. (Et non pas de rester à la maison à végéter!).

 

En fait, je vous invite à faire confiance aux valeurs que vous lui avez transmises et à ce qu’il est en tant que personne, en sachant qu’il va, à son heure (et souvent bien plus vite que les parents pensent), se prendre en main et retourner aux études.  Entre vous et moi, rien de mieux que des expériences de travail, même peu stimulantes, pour aider un jeune à mieux se connaître, découvrir ce qu’il veut, et surtout ne veut pas faire de sa vie, et ainsi trouver la motivation pour aller jusqu’au bout de ses rêves.

 

Mais attention, s’il est actuellement inscrit, il est essentiel de ne pas oublier qu’au cégep, lâcher un cours ne veut pas dire abandonner[1]. La date limite d’abandon (ou annulation) de cours, pour la session d’automne 2009, approche à grand pas. Demandez lui de vérifiez la date dans son agenda ou sur le site internet du cégep qu’il fréquente!

 

En résumé, votre jeune n’est pas prêt pour le cégep et veux arrêter pour un petit moment? Ce n’est certes pas l’idéal, mais c’est de loin préférable à un dossier académique faible, à l’impossibilité de réaliser ses rêves futurs et surtout à la perte de son estime de soi.

 


[1] Voir ma chronique de décembre 2008.