LES RECRUTEURS DE L’IMPOSSIBLE

Selon un récent sondage du MEDEF, huit entreprises sur dix ont beaucoup de mal à recruter en France !!!
Il est incroyable de constater alors que le taux de chômage bat des records, que les demandeurs d’emploi de longue durée sont de plus en plus nombreux, que 80 % des entreprises se plaignent de ne pas trouver chaussure à leur pied. Alors, d’où vient le malaise ?
D’un côté, vous avez beaucoup de demande donc plus de choix entre divers candidats pour le recruteur, et de l’autre côté une entreprise non satisfaite par la qualité des candidatures reçues ou bien, à chaque fois le petit truc, couac, qui va faire la différence dans la recherche éperdue du candidat idéal et qui fait que ce candidat ne peut être retenu pour une raison x, y …
Je pose la question aux recruteurs:
Si vous ne trouvez pas le candidat qu’il vous faut, n’est-ce pas l’occasion pour vous de vous remettre en question et d’inverser les rôles ?
Êtes-vous bien sûr que vos diverses exigences répondent à la réalité de votre marché, de votre environnement d’entreprise, économique et culturel et répondent aussi à de simples bases élémentaires en matière de psychologie ou ressources humaines ?
Êtes-vous intimement convaincus de répondre vous-même à vos propres exigences ?
D’être vous-même le candidat idéal au poste que vous proposez ?
Avez-vous conscience qu’en face de vous, se trouve un candidat avec sa propre expérience professionnelle, sociale et de vie, ses propres qualités, valeurs et défauts (et oui, ôtez-vous de la tête que l’être parfait existe, vous-même ne l’êtes pas), et non un être robotisé qui doit rentrer parfaitement dans les cases ou les couleurs désirées.
J’ai toujours été surpris par les batteries de tests psychologiques proposés aux candidats afin de définir leur portrait type psychologique. C’est la mode et c’est le jeu, d’ailleurs ces tests ressemblent plus à des jeux qu’à une séance de psychothérapie, et le candidat se prête volontiers aux questions-réponses afin que le recruteur sonde sa psychologie et son intimité.
Le candidat a répondu brillamment aux tests, son profil correspond à celui recherché par l’entreprise et à lui l’honneur de passer en entretien avec le recruteur…et là ! Énorme surprise !
Les résultats du test ne sont quasiment jamais abordés par le recruteur dans un échange de confiance et d’authenticité avec le candidat, alors à quoi bon en faire ?
La psychologie supposée du candidat (je dis bien supposée car celui-ci répond à un moment précis où son émotion, son ressenti, sa position de vie peut-être différente en fonction des événements qu’il aura vécu précédemment juste avant de faire le test, les tests ne sont qu’une photographie à l’instant t) n’est pas même prise en compte dans l’entretien par le recruteur dans sa façon de s’adresser au candidat, de communiquer avec lui et d’aborder les différents points essentiels du poste et de l’organisation.
On demande le profil psychologique du candidat et on ne s’en sert pas à bon escient.
Parfois, il arrive que des recruteurs par « jeu » prennent plaisir à déstabiliser le candidat afin de sonder sa capacité à réagir ou à encaisser, à gérer le stress de l’entretien comme il pourra gérer le stress au quotidien.
Et vous ? Vous êtes plutôt caleçon ou boxer ? Vous préférez les blondes ou les brunes ? Vous êtes plutôt famille ou amis ? Quel est votre acteur préféré ? etc.
Vous conviendrez avec moi que ce genre de question n’a non seulement aucun intérêt mais n’apporte rien pour le bon fonctionnement de l’entreprise.
Le candidat a brillamment passé l’entretien, les tests, il a les diplômes requis, l’expérience désirée et même au-delà de ce qui est demandé, il a un plus (formation ou diplôme complémentaire) qui peut être utile à l’entreprise, il a le + produit tant recherché par les recruteurs et l’entreprise.
Rien de mieux alors que de le tester en situation professionnelle une journée pour vérifier sa faculté   d’adaptation, son intégration au sein de l’équipe et vérifier aussi ses compétences professionnelles et humaines.
Tout se passe bien …et pourtant ce valeureux candidat reçoit par l’intermédiaire d’un tiers (agence intérim ou de recrutement) et non du recruteur de l’entreprise qui l’a reçu en entretien ou après de multiples relances téléphoniques auprès de lui, une réponse négative et embarrassée et là, tous les motifs sont bons.
Quand une entreprise n’arrive pas à recruter après avoir vu plusieurs candidats, soyons logique, c’est ou bien parce que le candidat rêvé n’existe pas ou bien parce que son service de recrutement ou de ressources humaines est incompétent.
Demandez toujours les raisons pour lesquelles votre candidature n’a pas été retenue et écoutez bien ce que l’on vous dit, ce n’est pas pour une raison professionnelle (manque d’expériences, de diplômes, sinon vous n’auriez jamais été reçu en entretien et en intégration professionnelle ou supervision pendant une journée), c’est souvent pour ne pas dire toujours pour une raison psychologique, le petit truc’, le couac qui a mis le doute dans la tête du recruteur.
Je pars du principe qu’un entretien est un échange adulte, authentique et basé sur une confiance mutuelle.
A mon humble avis, rien de mieux que de recevoir un candidat entier, vrai, franc, qui ne se cache pas, qui ne joue pas et pourtant cette franchise d’être soi va se retourner contre le candidat qui ne rentrera plus dans une des cases voulues, le moule. Chaque personne est unique, et il est utopique de penser que chaque collaborateur sera conforme comme un clone au reste de l’entreprise, ou à l’image de son recruteur ou du patron.
Le recruteur pensant à tort qu’il a la pensée, la logique, la psychologie universelle va retenir une petite phrase banale prononcée par le candidat, parfois une simple question sur l’organisation du service, le planning, les horaires, et le recruteur va se mettre à penser que si le candidat a dit cela, c’est parce qu’il pense que…
Vous recruteurs, êtes-vous bien sûrs d’être extra-lucides pour penser à la place de personnes que vous ne connaissez pas ? Non !
Aimeriez-vous que nous pensions à votre place ?
Alors, pourquoi tirer des conclusions qui n’engagent que vous et votre perception et non le candidat.  Pourquoi ne pas lui demander tout simplement dans un rapport de confiance mutuelle, au candidat, pourquoi a-t-il posé cette question ?  Où veut-il en venir ? Que veut-il dire par là ?
Tout simplement parce que le recrutement ne se fonde plus sur des bases solides que sont encore une fois l’authenticité, la confiance, dans un rapport gagnant-gagnant et qui fera que le futur collaborateur sera au clair avec lui-même, avec son entreprise, intégré au groupe dans lequel il se reconnaîtra, adhérera, aura sa place et participera parfaitement au développement du groupe.
Le recrutement se base sur un « jeu » de dupes et de séduction, des à priori , des critères subjectifs, des méconnaissances et croyances du recruteur sur son candidat et ce, dans un rapport gagnant-perdant dans la mesure où c’est le recruteur qui juge et décide (position de force) et que le candidat tel un caméléon doit se fondre dans le moule, ne poser aucune question qui puisse le mettre en défauts, être assez malléable et très fin psychologue afin de répondre au fantasme du candidat idéal du recruteur.
C’est ainsi que les plus malins obtiennent un poste qui va ensuite s’avérer infructueux et pour l’entreprise et pour le candidat car ni l’un ni l’autre ne s’est finalement placé dans une relation gagnant-gagnant, authentique mais dans le jeu trompeur de la séduction.
Le candidat « idéal  » dans l’entreprise « idéale « , ils eurent beaucoup de petits problèmes, ne vécurent heureux que quelques temps et finalement se séparèrent dans la douleur car plus grand est l’espace entre la croyance et la réalité (fantasme), plus grande et cruelle est la désillusion.
Ce qui est insupportable pour le candidat, c’est de ne pas avoir de réponse directe, franche et réfléchie de la part du recruteur qui l’a reçu. Pas retenu = pas de réponse, c’est tout d’un coup comme si le candidat n’avait jamais existé alors que celui-ci à prouver son intérêt vis-à-vis de l’entreprise en répondant à l’offre, en se déplaçant pour y rencontrer le recruteur, en consacrant de son temps à l’entreprise en journée de supervision. Pas de réponse, est-cela une attitude respectueuse et humaine ?
C’est indigne de la part d’un recruteur qui ne l’est pas vraiment « idéal ».
Non seulement, il dévalorise sa propre image en tant que recruteur mais aussi dévalorise l’image de l’entreprise qu’il représente.
Il n’est pas dans la logique des choses que ce soit au candidat de faire de multiples relances pour recevoir en finalité une lettre type, impersonnelle et de fin de non-recevoir.
La moindre des politesses est d’adresser au candidat les raisons de son éviction en toute transparence par respect pour lui et pour soi.
Idem, pour les recruteurs qui pour une raison indépendante de leur volonté sont absents au rendez-vous fixé avec le candidat, la moindre des choses par courtoisie et respect est de le prévenir et de convenir avec lui un autre RDV, et quand ce n’est pas le cas parce que le recruteur a zappé carrément l’entretien, c’est de lui envoyer un mail d’excuses et de convenir d’un autre RDV.
Tout cela vous paraît normal et pourtant tous les exemples cités, c’est ce que vivent beaucoup de candidats.
Un recruteur qui ne vous respecte pas, c’est une entreprise qui ne vous respectera pas, alors n’ayez aucun regret.
Message aux recruteurs:  » Cessez  de courir ou de croire après ce qui n’existe pas, sachez être à l’écoute, authentique et respectueux du candidat dans une relation adulte et franche, faites des formations en communication et/ou en psychologie et vous saurez reconnaître et embaucher sans peine le candidat qu’il vous manque « .
Message aux candidats:  » Placez-vous dans une relation gagnant-gagnant , vous n’êtes pas demandeur mais vous offrez vos services, n’ayez pas peur de négocier votre salaire car ce sont votre expérience, vos compétences et valeurs et votre estime qui en seront récompensées, vous offrez vos services et on vous paye en retour à votre juste valeur. L’entreprise doit être fière de vous compter parmi ses collaborateurs. »
Cordialement
Christophe Georgin