Défendre ses droits !

Les manifestants hurlent sous mes fenêtres pour défendre Leur retraite et je peine à entendre Abouh qui pourtant crie dans son téléphone, depuis le Cameroun, pour m’expliquer que sa mère est malade.

Sans doute ont-ils oublié que la liberté de chacun s’arrête où commence celle des autres !

Abouh me demande de lui envoyer de l’argent pour pouvoir hospitaliser sa mère ou, au moins, pour lui acheter des médicaments.

Je réponds par la négative à Abouh et lui suggère de voir autour de lui si quelqu’un ne peut pas le dépanner…

– Mais tu ne te rends pas compte, me dit-il, comme c’est dur ici !

Je me souviens qu’il m’a déjà expliqué que, même sans argent, il préférait résider en France plutôt que dans son pays :

– En France, me disait-il, si je tombe sur le trottoir, il y aura toujours un SAMU pour me ramasser ; au Cameroun, je pourrais crever sans que personne ne s’en soucie ! Si tu n’as pas d’argent, tu ne peux pas te faire soigner…

Les manifestants ajoutent les sirènes aux hurlements ! Ils sont comme des enfants gâtés qui font une colère parce qu’on tente de leur retirer leur jouet…

Pourtant ils n’ont jamais rien fait pour construire leur retraite, rien d’autre que de périodiques manifestations ; ce sont leurs parents – en travaillant beaucoup plus de 35 heures par semaine dans des conditions de pénibilité qu’on ne connait plus aujourd’hui – qui ont construit cet avantage extraordinaire (parce qu’il ne bénéficie qu’à une toute petite partie de la population mondiale) et ils se dissimulent qu’ils vont en faire supporter le coût à leurs enfants qui, eux-mêmes, n’en bénéficieront pas à cause des années perdues à trouver leur premier emploi (L’âge moyen du premier emploi se situerait aujourd’hui autour de 27 ans).

Abouh continue de hurler dans son téléphone que si je ne l’aide pas, sa mère va mourir

C’est pourtant une forte femme, sa mère, une maîtresse-femme même qui dirige sa maisonnée avec efficacité ; pas une femme libérée, non, ça n’existe pas au Cameroun, mais pourtant c’est bien elle qui prend les décisions dans le foyer.

La manifestation s’éloigne et j’accepte d’envoyer un peu d’argent à Abouh…

Ce soir, à la télévision, on déversera des flots de compassion sur ces pauvres travailleurs qui sont obligés de descendre dans la rue pour défendre leurs droits !

La mère d’Abouh, elle, n’a pas de droits…

On nous assènera le sempiternel radio-trottoir : « Evidemment, ça me gène un peu, mais je les comprends : Ils ont raison de défendre leurs droits… »

La mère d’Abouh, elle, n’a rien à défendre…

Ce n’est certes pas une raison pour ne pas tenter d’améliorer notre propre sort !

Mais peut-être pourrions-nous le faire un peu moins bruyamment ?…

Peut-être pourrions-nous aussi remonter nos manches et travailler tous ensemble, salariés et patrons, pour améliorer le sort de chacun plutôt que, par exemple, de casser toute l’activité économique d’une ville comme Marseille au moment où les chinois sont en train d’aménager leur tête de pont européenne dans le port du Pirée…

Les chinois, après tout, ont bien le droit de nous envahir…

Jean-Claude Gouigoux
http://mindspirit80.blogspot.com

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