Article rédigé par Pascale Piquet et paru dans La Presse, le mercredi 8 avril 2009 – Rubrique « Opinion »
Notre Belle Province est secouée : ses enfants tombent dans de tels vides, qu’ils ne voient pas d’autre issue que la mort. Pourtant, les solutions sont là : Vous pouvez en sortir et ça ne prend pas 10 ans ! En 2002, je suis moi-même à genoux, pliée en deux sur le sol de mon salon, incapable de respirer : mon conjoint est parti entre deux policiers après une dernière bagarre, je n’ai plus de travail, plus d’argent, pas d’amis (je suis arrivée de France en 2001), le nez dans l’alcool et une petite fille de sept ans à élever. J’avais déjà failli « trucider » le père de ma fille et voilà que ça recommençait avec le deuxième conjoint. Vous reconnaissez-vous dans toute ou partie de ma situation passée ? Aujourd’hui, j’en suis sortie et c’est le bonheur qui m’accompagne chaque jour. Ne renoncez-pas, battez-vous, reprenez le contrôle de votre vie en développant votre confiance et votre estime. Allez voir un professionnel, médecin, psy, thérapeute en médecine douce, coach, sachez que les solutions existent et que vous pouvez sortir de cette souffrance qui vous vrille les entrailles, depuis votre plus tendre enfance.
Car effectivement, c’est dès la conception que vos programmations commencent, forgées par les gens qui vous ont encadré et les situations malheureuses que vous avez vécues. C’est ainsi que se crée votre perception de vous-même et des relations avec les autres. Si vous avez été rejeté ou abandonné, vous parlerez le rejet et l’abandon dans votre vie d’adulte. Si vous avez été aimé et respecté, vous parlerez l’amour et le respect. Les parents sont responsables à 90 % de cette carence affective qui entraîne un manque de confiance et d’estime : ils ont été des pourvoyeurs, mais n’ont pas su donner ce qu’ils n’avaient pas reçu : la reconnaissance (j’existe), l’affection (je suis aimable et estimable), la protection (je suis précieux à mes propres yeux). Résultat, vous partez dans la vie avec un vide qui grandit avec vous, d’autant que vous irez d’échec amoureux en échec professionnel, d’échec professionnel en échec financier. Echec et mat ! Et pendant quelques instants, vous ne voyez pas d’autre issue que la mort : pourtant les solutions sont là !
Vous devenez alors un Guy Turcotte, cardiologue qui n’accepte pas de vivre plus longtemps, ni que ses enfants vivent plus longtemps. Une Adèle Sorella, en dépression, qui tue ses enfants, un homme de 57 ans qui tue sa conjoint ou encore une Cathie Gauthier qui tue ses enfants et son conjoint et tente de s’ôter la vie mais échoue, ou encore un jeune de 19 ans qui tue son frère et attaque ses parents, une Pascale Piquet qui manque de tuer ses deux conjoints. Le pire, c’est que dans la plupart des cas, aucun signe avant-coureur n’alarme qui que ce soit dans l’entourage. Pourquoi ? Parce que vous êtes habitué à « encaisser », à « endurer », vous avez « acheté » que la souffrance fait partie de la vie. Dans ce domaine, vous êtes servi, votre coupe se remplit jusqu’à être pleine, jusqu’à la fameuse goutte d’eau qui fera déborder votre vase : vous commettez l’irréparable. Depuis votre naissance, vos parents, vos (faux)amis, certains enseignants, votre patron, vos collègues de travail ont tous rempli votre brouette : de mauvais coup en mauvais coup pris sur le nez, la tristesse augmente et la colère gronde, de plus en plus. Jusqu’à exploser.
Je le sais pour l’avoir vécu : si j’avais supprimé mon mari, je serais en prison à l’heure qu’il est, sans comprendre comment j’en étais arrivée là. Si j’avais été relâchée pour bonne conduite, après 10 années d’emprisonnement, je me serais accrochée aux barreaux en disant : « Ne me relâchez pas, je ne sais pas pourquoi j’ai tué celui-là, je vais en tuer un autre ! ». J’ai compris très tard que je souffrais de dépendance affective, ce cancer qui vous ronge le cœur et l’âme parce que la confiance et l’estime se consument après chaque mauvais coup reçu. Relevez-vous, allez chercher de l’aide, faites un pas vers quelqu’un au lieu de vous tourner le dos : j’avais un genou à terre et je refusais d’y mettre le deuxième, je disais sans arrêt « ils n’auront pas ma peau ». Je parlais de tous ceux qui m’ont fait souffrir auxquels j’ai dédicacé mon livre « Le syndrome de Tarzan » (Béliveau éditeur). Je me suis battue, j’ai repris le contrôle de ma vie, vous le pouvez aussi. Et si je baisse les bras aujourd’hui, c’est pour relever ceux qui sont tombés et qui veulent se redresser.