La Violence des Enfants: Reflet d’une société malade d’elle-même
De plus en plus de faits divers dramatiques ont lieu à l’école qui est une institution républicaine où les enfants logiquement apprennent à lire, écrire, se sociabilisent, s’instruisent et se structurent socialement au sein de la communauté. L’école de mon enfance a bien changé, elle est devenue, non plus un lieu d’apprentissage de la morale et des valeurs, mais un lieu de violences verbales, physiques, humiliations, rackets, viols collectifs, meurtres, suicides. Désormais, l’école publique n’est plus un lieu sécurisé avec un cadre définit et structuré.
Des enfants, de jeunes enfants meurent ou sont agressés sauvagement par leurs camarades et ce de plus en plus jeunes.
Dernier fait divers en date qui me fait réagir aujourd’hui: une fillette de 2ans et demi agressée à l’école maternelle par quatre élèves de grande section l’ont entraînée à l’abri des regards, derrière une petite cabane, pour ensuite la frapper violemment.
Pourquoi une telle violence si jeune, si précoce?
Je ne peux pas concevoir que ces jeunes enfants aient conscience de leurs actes, ils ne font que reproduire des comportements vus ou appris et qu’ils pensent être le comportement adéquat pour être intégré, reconnu dans une société déstructurée et malade ou comme étant la bonne résolution à tous problèmes.
Dans le cas de ce dernier fait divers, il s’agit réellement de violence gratuite et sans fondement justifié, c’est en cela que je la trouve très grave, toujours plus jeune, plus brutale, quotidienne et banalisée.
La violence est en chacun de nous, elle est instinctive:
Il a été démontré par de nombreux chercheurs que la violence est ancrée dans tout le règne animal et nous n’échappons à cette règle, il s’agit d’un instinct de survie naturel pour l’individu et pour l’espèce.
A chaque fois que nous nous sentons menacés dans notre intégrité, nous devenons instinctivement violents même si cette menace n’est pas réelle mais le fruit de notre interprétation ou si on nous fait croire que nous sommes menacés. La violence est liée aussi à l’environnement culturel (TV, informations, films, magazines), sociale(chômage, exclusion,précarité, pauvreté) et à l’éducation (manque de cadre protecteur, de références parentales, de limites) et à la souffrance non résolue des parents que les enfants vont reproduire.
Quelle émotion engendre la violence?
La colère: Non satisfaction de nos besoins: comme un bébé qui va se mettre dans une profonde colère si nous ne répondons pas de suite à son besoin de manger. Et nos besoins que nous confondons avec nos envies sont de plus en plus stimulé par une société de consommation agressive. Le constat de ne pas « avoir » engendre une grande frustration qui va s’exprimer par la colère. Le manque de considération et d’appartenance va générer un sentiment d’injustice ou de rejet, d’exclusion. Des quartiers ghettoïsés, non réhabilités, non rénovés, où règnent le chômage, la pauvreté, la discrimination va accentuer ce sentiment d’exclusion et engendrer la violence. Ce sont les banlieues qui flambent, pas les quartiers riches ou en centre-ville.
La peur: Elle provient d’un sentiment d’insécurité pour soi, sa famille, pour l’espèce. C’est l’instinct de survie qui se met en place. Imaginez que malgré votre bonne volonté, efforts, vous perdez ou ne trouvez plus de travail… Pas de travail, pas d’argent, vous avez de plus en plus de mal à subvenir non à vos envies mais à vos besoins naturels (manger, se loger, s’habiller) et que quotidiennement, vous êtes assaillis de mauvaises nouvelles: c’est la crise, licenciements, augmentation du chômage, encore et encore plus de sacrifices à faire, et pour certains: stigmatisation, discrimination, racisme. Et en même temps, vous apprenez aussi qu’il n’y a jamais eu autant de millionnaires, de milliardaires en France et dans le monde. Il y a de quoi avoir peur !
Il arrive un moment où le choix est simple: subir et vous laisser mourir ou réagir dans la colère face à un sentiment d’injustice de plus en plus flagrant. Vous avez peur pour votre survie, celle de votre famille et de votre communauté.
L’éducation parentale: Quand les parents ont perdu leurs repères, cadre de référence qu’il soit personnel (souffrances dans l’enfance, maladie, dépression, suicide), affectif (divorce, séparation), social (chômage, exclusion), que leur vie a perdu son sens face à un sentiment d’isolement et d’un avenir incertain.
Quand les parents sont eux-mêmes déstructurés, la violence s’installe dans le foyer (violences conjugales, drames conjugaux), dans le quartier (révoltes, délinquance), dans la société elle-même.
La violence devient le cadre de référence pour se faire entendre, être considéré, appartenir, pour survivre.
La société et la politique: Face à une société centrée sur l’individu, à la satisfaction primaire de nos envies, de posséder encore et toujours plus, de faire des profits et non sur l’échange, le partage et le désir d’appartenance à une communauté. La violence s’est installée sournoisement partout et nombreux sont les mouvements de grèves pour dénoncer une violence quotidienne.
Nos politiques sont les premiers à user de violences verbales dans leurs propos (manque de respect vis-à-vis de leurs concitoyens et entre eux), dans leurs actes (affaires qui n’inspirent pas l’honnêteté, les valeurs morales), leurs décisions (accroître les inégalités sociales, stigmatiser des communautés).
Quand vous décidez pour préserver une caste financière minoritaire, d’appauvrir votre peuple encore plus, que vous diminuez pour des raisons budgétaires les aides alimentaires, les aides sociales, les acquis sociaux, la couverture sociale, que vous supprimez des effectifs dans l’éducation nationale, la santé, la police, la justice, que vos décisions provoquent des licenciements, des délocalisations, des fermetures d’entreprises, que tout cela augmente le chômage, la précarité, les inégalités dans votre pays, vous détruisez le cadre de référence de la société dont vous avez la charge. Les individus ne se reconnaissent plus au sein de cette société, ne trouvent pas leur place et il ne faut surtout pas s’étonner que dans un sursaut instinctif, qu’ils deviennent violents vis-à-vis de leurs semblables.
La violence n’est pas une solution, elle engendre elle-même de la violence en réponse.
Je ne l’excuse pas, je ne la prône pas, je la comprend car elle est l’expression brutale et instinctive d’un profond mal-être individuel et social.
Chaleureusement à vous
Christophe GEORGIN
http://www.libreavecsoi.com