Mis à part les rescapés d’un enlèvement par des extra-terrestres et les villégiataires de retour d’une retraite de 10 ans en Papouasie, il n’est pas un européen qui n’ait entendu parler de l’Euro. Dans cette dernière ligne droite, à quelques mois du lancement officiel de la nouvelle monnaie “unique”, les autorités commencent à s’inquiéter du faible taux de sociétés déjà converties à cette monnaie “scripturale” en attendant la disponibilité de son équivalent “fiduciaire”.
Il serait déjà judicieux de s’interroger sur la légitimité du terme “unique”, s’agissant d’une monnaie déployée en non moins de 7 billets et 8 pièces de valeurs distinctes, ces dernières étant par ailleurs déclinées en autant de variantes que de pays participants.
Tout en souriant au plaisir d’enrichir notre vocabulaire de si jolis nouveaux mots, nous en oublions l’effet le plus pervers, à savoir, la disparition de celui particulièrement cher à notre culture française: le Franc !
Car si l’on prend au pied de la lettre l’injonction qui nous est faite de remplacer toute occurrence du vocable “franc” par celui d’“euro”, nous serons inévitablement confrontés à un véritable cataclysme culturel.
Pour commencer, si les Belges, Suisses et Canadiens ont la chance de conserver leur nationalité, les Français devront-ils s’expatrier virtuellement vers l’Euroce pour y devenir des Eurolais ? Et ce peuple si vif d’esprit risque-t-il de perdre son “euro-parler” ?
Nous serons également surpris d’apprendre que Mérovingiens et Carolingiens n’étaient en fait que des “Euros” et leur redoutable hache à 2 lames, une vulgaire “Eurocisque”. Oserez-vous avouer que vous habitez “l’Euroche-Comté” et que lors de votre dernier match de football, vous n’avez pu marquer sur un coup-euro qui eu été salvateur ?
Vous n’aviez pas vraiment réalisé tout cela ? Maintenant, votre “Euro” est tombé ? Que vont devenir les “Francofolies”, le “tour de France”, le “Francophonissime”, les francs-tireurs, la franc-maçonnerie, les livraisons franco de port, les frères franciscains, Anatole France… ?
Effrayant ! Serons-nous capables “d’eurochir” ce cap si délicat, où le commerçant suisse devra rendre la monnaie sur octante-trois euros soixante-dix-sept eurocents à un Belge ne disposant que de nonante-dix franc zéro centime et dont l’épouse, française, lui demandera combien cela fait en anciens Francs.
“Eurochement”, ces déconvenues n’étaient certes pas prévues au programme et devant ce complot monétaire international, on ne peut que s’indigner : Pas très “Franc”, cet Euro !
Article publié sur Babelweb le 14/08/2001.
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