Terreur sournoise

Quand l’attaque ne vient pas d’où on l’attend…

Comme chaque matin, Paul Dufour se rendait à son travail, pour une journée banale et routinière. Il est vrai que son emploi de documentaliste au service courrier d’une grosse multinationale ne laissait pas beaucoup de place à l’imprévu. Jacques, son collègue, était chargé de réceptionner et d’ouvrir le courrier, et Paul prenait le relais en répartissant les plis et autres colis dans des piles savamment réparties en fonction des destinataires, mais aussi des étages, du niveau de confidentialité, et tutti quanti.

Aujourd’hui, cependant, il s’attendait à une légère variation de son programme quotidien. La veille, au soir, ils avaient tous été convoqués dans le bureau du chef de service afin de prendre connaissance des nouvelles dispositions en matière de sécurité. Les présumées attaques terroristes à l’Anthrax caché dans des lettres piégées impliquaient des mesures draconiennes pour protéger le personnel. Pour le service courrier, rien de plus simple : ils allaient devoir travailler en portant des gants et un masque, ce qui aurait certainement le mérite du dépaysement en leur donnant l’impression de travailler dans un laboratoire de haute sécurité.

Paul trouvait ces mesures un peu excessives et il y songeait encore en entrant dans son local, où il pensait retrouver son compagnon de travail. Jacques, dont l’horaire, décalé d’une heure en raison de sa mission qui représentait la première étape de toute la chaîne, l’accueillait chaque matin en lui faisant part des potins du jour. Il se ferait certainement une joie de donner ses premières impressions sur les nouvelles conditions de travail qu’il aurait inaugurées une heure plus tôt, mais…

Point de Jacques à l’horizon. La pièce, vide, semblait avoir été la scène d’un événement que Paul n’identifiait pas. Mais il en était certain : il s’était passé quelque chose !
La chaise renversée était un signe indubitable, mais d’autres détails lui vinrent immédiatement à l’esprit. La boîte de secours « première urgence » était ouverte sur le bureau, les documents épars sur l’autre moitié et dont certains étaient même tombés à terre. Le manteau de Jacques et son porte-documents étaient présents, au contraire de leur propriétaire. Mais surtout, un élément évident lui fit comprendre qu’il ne se trompait pas : le courrier n’était pas ouvert, à part quelques enveloppes jetées négligemment çà et là…

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Texte publié en octobre 2001 sur Babelweb.

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