Lors de son face à face avec Nicolas Sarkozy, l’actuel président français François Hollande avait marqué les esprits par sa tirade « moi, président, je …. ». Il l’a répété seize fois! Un exercice de haut voltige, dont peuvent s’inspirer les managers.
D’aucuns ne dira le contraire: pour convaincre, il faut être convaincant. Et pour l’être il faut être soi-même convaincu. Cette faculté peut être innée, chez certaines personnes. Comme on peut l’acquérir et la développer. C’est une faculté, comme les autres.
Une tirade, désormais célèbre
Après le premier tour, François Hollande et Nicolas Sarkozy ont tenu leur face à face, le 2 mai, durant un débat télévisé. C’était le débat de tous les enjeux, les deux candidats ont fait feu de tout bois pour se prévaloir et marquer des points contre l’adversaire.
Bien entendu, leurs conseillers en communication et coaches avaient du pain sur le plancher. Ils les ont aidés à préparer leur intervention et à gérer leur communication non-verbale. Gestuelle maîtrisée chez Nicolas Sarkozy. Gestuelle plus animée chez François Hollande. Voix calme chez Sarkozy, voix posée chez Hollande.
A la question de Laurence Ferrari qui leur demandait « quel président, comptez-vous être? », François Hollande a saisi l’opportunité pour égrener une longue tirade en répétant seize fois de suite et en moins de trois minutes: « Moi Président de la République, je … »!
C’est ce qu’on appelle une anaphore. C’est une figure rhétorique, qui signifie la répétition d’un mot au début de plusieurs phrases. En dehors du jeu de style, l’anaphore est une technique assez répandue dans la communication empruntée à la « méthode Coué ». Elle a force d’autosuggestion et d’auto-motivation. En effet, l’anaphore rythme les phrases et leur donne un effet musical. Elle donne plus d’énergie au discours et permet de visualiser une situation. Si la répétition est un défaut à l’écrit, elle est une grande qualité à l’oral.
En égrenant, à voix haute, seize fois de suite « Moi, président, je … », François Hollande s’est s’autoproclamé Président, a nourri sa motivation et s’est projeté dans une probable réalité. Ces seize répétitions ont été, par ailleurs, des suggestions fortes et puissantes pour les millions de spectateurs français.
Le marchand du bonheur
Le pharmacien français, Emile Coué est le père fondateur de la méthode hyponyme. Il a été le premier à utiliser le placebo. Dès le début de sa carrière, le jeune pharmacien a constaté le pouvoir qu’il peut avoir sur la guérison de ses patients.
La méthode Coué a rencontré un franc succès outre-Atlantique. On lui doit, entre autres, le « Yes, we can » d’Obama. D’ailleurs, aux Etats-Unis, Emile Coué est surnommé “le marchand de bonheur”. Un titre qui en dit long sur les apports de sa technique, qui, durant très longtemps, a été méconnue au bataillon en France, jusqu’à l’anaphore de François Hollande qui l’a mise sous les feux de l’actualité.
La méthode Coué peut être, facilement, déployée en entreprise pour passer un message, pour mobiliser les troupes, pour vendre un projet d’entreprise, pour mettre sur orbite une équipe.
Mais avant d’aller plus loin, allons savoir de quoi s’agit-il exactement? Pour faire bref, pour Emile Coué « toute pensée que nous avons en tête a tendance à se réaliser dans la limite du raisonnable ».
Dit autrement, notre subconscient est à l’origine de nos états physiques et mentaux. Et c’est par notre imagination que nous pouvons communiquer avec notre subconscient. Nos images et nos représentations, négatives ou positives, ont un impact certain sur nous et sur nos relations avec les autres. « Nous avons cette liberté et cette capacité d’imaginer le possible et le positif, » explique Emile Coué.
Donc, quelle que soit l’image, notre subconscient va mettre en route un processus qui va en faire une réalité. Coué disait, il y a un siècle, que «nous possédons en nous une force d’une puissance incalculable qui, lorsque nous la manions d’une façon inconsciente, nous est souvent préjudiciable. Si, au contraire, nous la dirigeons d’une façon consciente et sage, elle nous donne la maîtrise de nous-mêmes et nous permet non seulement d’aider à nous soustraire nous-mêmes et à soustraire les autres à la maladie physique et à la maladie morale, mais encore de vivre relativement heureux, quelles que soient les conditions dans lesquelles nous puissions nous trouver.»
Pour lui, l’imagination est plus forte que la volonté. Comment? « Prenons le cas d’un insomniaque qui veut dormir ou d’un alcoolique qui veut arrêter de boire. Ils ont, tous les deux, la volonté, mais ils n’y arrivent pas. Pour Coué, il ne suffit pas de vouloir guérir, il faut aussi s’imaginer guéri, » explique Luc Teyssier d’Orfeuil, le spécialiste français de la méthode Coué. Il a organisé, en 2011, la première rencontre annuelle qui a regroupé les « Couéistes »
Pour Coué, la première faculté de l’homme est l’imagination. Donc, cette faculté va, énormément, l’aider à s’auto-suggérer des choses positives, bien entendu. Quand il y a lutte entre l’imagination et la volonté, c’est toujours l’imagination qui l’emporte, sans aucune exception, à condition de la stimuler par une autosuggestion méthodique et régulière. Lorsque la volonté et l’imagination sont en accord, elles ne font pas que s’ajouter, elles se démultiplient. « L’homme est ce qu’il pense« .
Coué en entreprise
Nezha Bidouane, notre championne olympique, expliquait, lors d’une émission télévisée, qu’elle visualisait ses courses. Elle jouait, d’abord, sa course dans sa tête, ce qui l’aide à mieux la courir sur le terrain. La visualisation est une des techniques d’autosuggestion recommandée par la méthode Coué.
Selon Coué, on peut s’auto-motiver, aussi, en se répétant, régulièrement, des phrases positives. C’est le cas de l’anaphore de François Hollande.
L’utilisation de la méthode Coué en entreprise peut aider le manager à prendre des attitudes et à avoir un discours « positifs » et à aider ses collaborateurs à adopter un style empreint de « positivité ». « Yes, we can ».
Emile Coué, le pharmacien français
Émile Coué de la Châtaigneraie est né le 26 février 1857. Émile Coué est un élève brillant qui souhaite devenir chimiste. En 1882, il obtient avec succès son diplôme de pharmacie. Il s’installe à vingt-six ans comme pharmacien à Troyes.
Il prend rapidement conscience de l’influence qu’un pharmacien peut avoir sur la guérison de ses clients. Il ne se limite pas, alors, à un travail d’apothicaire et développe progressivement sa méthode.
En 1902, Emile Coué se retire à NANCY où il poursuit ses recherches sur l’autosuggestion et prépare des conférences qu’il va donner à travers le monde. En 1913 un jeune licencié en philosophie, Charles Baudouin, prend contact avec lui. Il souhaite appliquer ses travaux à la pédagogie de l’enseignement.
Charles Baudouin, premier « disciple » d’Emile Coué, va par ses écrits le faire connaître au-delà des frontières. Il le pousse à donner des conférences aux Etats-Unis, en Allemagne, en Russie.