Je me sens aujourd’hui habitée par une mission : celle de défendre la colère. Elle est presque toujours associée à l’agressivité, la violence ou au manque de contrôle. Elle est souvent considérée comme la rebelle, le mouton noir de nos émotions. Alors, je me porte à sa rescousse afin de la faire passer de l’ombre à la lumière !
La colère, comme toutes les autres émotions, joue un rôle important pour nous informer des obstacles à notre satisfaction. Elle est ressentie à l’égard de ce qu’on détermine, à tort ou à raison, comme étant « responsable » de notre frustration. On éprouve donc de la colère envers « l’obstacle » qui, selon nous, nous empêche de nous sentir satisfait et de rétablir l’harmonie intérieure. Et je peux vous dire aujourd’hui, qu’à cette époque, je blâmais mon état et comment je me sentais, sur tout ce qui était devant moi ou autour de moi, tout ce qui m’arrivait ou ne m’arrivait pas, tout ce qu’on me disait ou ne me disait pas, etc.
J’ai remarqué que ma colère surgissait lorsque mon équilibre était menacé ou brisé dans un des aspects de ma vie. J’ai aussi réalisé que ma colère était porteuse de message, soit qu’un besoin était insatisfait, qu’un désir n’était pas comblé, que j’étais dans une position d’attente et que je n’avais pas de réponse et peut-être aussi, ce qui était mon cas, abusée et violée, le rappel de mes blessures que je n’avais pas pris soin de cicatriser.
Je ne sais pas pour vous mais moi, j’ai grandi dans un environnement où le non-dit était priorisé plutôt que l’expression de soi. Exprimer sa colère n’était pas permis, on me culpabilisait et j’éprouvais de la honte non seulement d’avoir envie de la dire mais encore plus de la ressentir. Je me suis donc adaptée et il était plus facile pour moi de vivre la honte que la colère, alors, j’ai appris à la refouler. Cependant, en prenant la fuite au lieu de lui faire face, elle s’est manifestée autrement comme par exemple, l’impatience, l’agitation, l’ennui, l’irritabilité, le sarcasme, la condescendance, la dévalorisation, la dramatisation, la victime, en ordre ou dans le désordre !
La colère n’est pas un signe d’impuissance. Au contraire, elle représente le message d’une lutte avec soi-même, d’une résistance à ce qui est devant soi et de l’affirmation de soi en tant qu’être humain qui revendique son individualité. Sans cette émotion, je serais incapable de me questionner, d’exprimer mes besoins, d’affirmer mes valeurs, de rétablir mon harmonie intérieure et de me défendre, si besoin est.
Il est certain que j’ai eu recours à différentes ressources extérieures pour aller chercher le support nécessaire afin de faire face à l’accumulation de près de 40 ans de colère ! Actuellement, mise à jour, j’en suis venue à la conclusion que la colère est saine et essentielle et que lorsqu’on dit qu’il faut régler le problème de la colère, c’est plutôt la façon de la gérer intérieurement, de transférer la responsabilité qui nous appartient et de l’exprimer qui ne l’est peut-être pas.
Je vous écris, ce jour avec un sourire, dans un état absolu de gratitude face à la colère, cette messagère qui a su, par sa ténacité et son désir de me faire comprendre son message, m’amener au point de bascule et à ma transformation vers un bien-être que je n’aurais pu imaginer, donc encore moins l’espérer. Elle continue de me ramener à l’ordre quand le risque de dérapage est apparent et je la remercie, cette gardienne de mon harmonie intérieure.
Alors, est-ce que vous continuerez de voir la colère du même œil ?
Céline Legault