Encore un proverbe! Vrai, indéniablement. La complémentarité, c’est aussi l’association de compétences diverses. Le couple devient une vraie équipe. Chacun bénéficie des talents de l’autre. «Les forces de l’un pallient les faiblesses de l’autre et inversement, de sorte que le couple comme unité parvient à réaliser des choses que chacun des membres pris individuellement trouverait plus ardues», explique Pierre Langis. Après avoir été victimes d’un cambriolage, Alain et Caroline, parents de 2 enfants, ont éprouvé des problèmes avec leur assureur. Caroline a pris les choses en mains, s’est défendue, a gueulé et Alain, de nature plus passive, ne s’en est pas mêlé. «Je suis très heureux que Caroline soit comme ça. Moi, je n’aurais pas été capable de me battre», dit-il, soulagé et reconnaissant.
Le fait d’être complémentaires nous amène aussi à développer des talents, le conjoint nous servant de modèle, de mentor, de soutien, voire de professeur. Encouragée par Alain, Caroline fait maintenant du vélo – «en terrain plat, et je ne transporte pas ma bicyclette», tient-elle à préciser. La complémentarité peut également être une source de croissance personnelle. «Par son indépendance, soutient Laurence en parlant de Manuel, il m’a montré que je pouvais trouver la mienne. Je l’avais à l’intérieur de moi, mais je manquais trop de confiance pour l’exprimer.» Accepter et apprécier les différences de l’autre mène à une plus grande maturité, tant pour le couple que pour chacun des conjoints.
Attirés par des intérêts différents, les conjoints complémentaires passent souvent moins de temps ensemble, bien sûr. Sylvie y voit un avantage: «Moins de monotonie, plus d’action!» Perd-on le contact? Pas si on a envie de le garder! Laurence juge important de continuer à se raconter les petites et grandes choses du quotidien, même si elles datent de quelques jours. «Quand on a des vies parallèles, on oublie parfois de se tenir au courant de ce qu’on fait», remarque-t-elle. Mais la liberté qu’on s’accorde compense le fait de se voir peu. Et puis, il n’est pas nécessaire de vivre collés l’un à l’autre pour être heureux. «Cette liberté d’être soi-même, d’explorer et faire la rencontre ses propres voies et de développer ses ressources individuelles crée, entre les deux partenaires, père et mère, un espace dynamique qui stimule la création, la liberté d’expression, l’exploration et le changement continuel», estime Jean Garneau. Il ajoute: «Essentiellement, ça nous mène vers l’épanouissement.»
Si la complémentarité n’est pas en soi un gage de durée, les aptitudes qu’on acquiert quand on vit avec un être différent de soi persistent, elles. Et quand un couple complémentaire continue d’évoluer dans l’amour et la joie, c’est qu’il a appris le respect mutuel. «On ne peut pas empêcher l’autre d’être ce qu’il est», affirme Sylvie.
Au cours d’une entrevue accordée au magazine suisse L’Hebdo, le psychologue Guy Corneau soutenait la même chose, en d’autres mots: «Si je regarde les quelques couples que je juge très heureux et dans lesquels les partenaires sont vraiment des tremplins l’un pour l’autre, je m’aperçois qu’il y a beaucoup de liberté dans ces couples-là, beaucoup de respect, beaucoup d’amitié et de compréhension pour un processus d’évolution qui n’est pas le sien.» Avec son aplomb habituel, Caroline résume la situation: «Je suis bien contente qu’Alain soit différent de moi. Ce qui compte, c’est d’abord qu’il soit lui-même.»