Quand je pose la question: Pour vous, qu’est-ce une famille heureuse ?
Les réponses sont les suivantes: C’est d’être marié(e) et d’avoir des enfants – Avoir une belle maison et de l’argent – Avoir des loisirs et partir en vacances – Bien éduquer nos enfants ou avoir des enfants sages et polis, respectueux.
Etes-vous sûrs de ces bonnes réponses ?
Une famille heureuse pour moi, c’est l’union d’un homme et d’une femme autonomes, adultes dans une relation égalitaire avec un ou des enfants épanouis qui évoluent naturellement en fonction de leur âge.
L’homme devient un père et la femme une mère, uniquement vis-à-vis de l’enfant, ils vont former un triangle relationnel. Chaque enfant étant un être unique et différent, et les parents ayant évolué au fur et à mesure des naissances par leur propre expérience de parents, à chaque naissance va se former un nouveau triangle relationnel bien distinct des autres.
Dans des fratries, il n’est pas rare d’entendre un ou une se plaindre d’avoir été délaissé par rapport à son frère ou sa soeur, » Il ou elle était le chouchou de mes parents » , » Mes parents étaient beaucoup plus sévères avec moi qu’avec mon frère ou ma soeur, » et les parents de répondre: » nous vous avons aimé et éduqué de la même manière »
Cela montre bien que pour chaque enfant, la relation est différente ou perçue comme telle par l’enfant, et donc l’existence d’un triangle relationnel propre à chaque enfant.
Qu’est-ce qu’un bon père, une bonne mère? Il n’existe pas d’écoles de parents, de recettes miracles, tout dépend de le relation que chaque parent entretient d’abord avec lui-même.
1) Tout d’abord, l’enfance du parent: Son vécu d’enfant, l’image paternelle et maternelle qu’il ou elle a intégré quand il ou elle était enfant. Ses propres croyances, les injonctions parentales, les contre-injonctions et le programme parental qu’il ou elle a reçu, son scénario de vie. Sa place d’enfant au sein de son triangle parentale.
2) Ensuite, son accession à la maturité, à l’autonomie, à sa masculinité pour le père et à sa féminité pour la mère.
Le bonheur d’une famille dépend de l’histoire de chaque parent, de l’enfant heureux ou malheureux qu’ils ont été enfants. L’état du moi Enfant du père et de la mère est l’ange gardien ou le démon du parent qu’il va devenir.Par conséquent, c’est l’état du moi Enfant du parent qui va consciemment ou inconsciemment, verbalement ou non , envoyer à l’état du moi Enfant de l’enfant une des injonctions suivantes:
– N’existe pas; Ne sois pas toi-même ou de ton sexe; Ne sois pas un enfant; Ne grandis pas; Ne réussis pas; Ne fais pas; Ne sois pas important; N’appartiens pas; Ne sois pas proche; Ne sois pas en bonne santé; Ne pense pas; Ne ressens pas.
Si l’enfant traverse sereinement sa croissance, qu’il a l’âge qu’il doit avoir, qu’il grandit à l’abri de toute culpabilité, qu’il est nourri par l’amour sain de ses parents, sécurisé par une autorité saine et juste, alors il aura beaucoup de chances d’accéder à une autonomie à l’âge adulte.
Par contre, si cela n’est pas le cas, que l’enfant est inconsciemment utilisé pour guérir l’Enfant de ses parents, qu’il devient ce qu’on appelle un « enfant thérapeute », que des injonctions fortes lui ont été adressés, alors il a de grandes chances plus tard d’être lui-même co-dépendant affectivement dans une relation fusionnelle, symbiotique où il cherchera à guérir lui-même son propre enfant à travers l’autre.
Quand l’évolution naturelle n’a pu se faire, l’enfant reste bloqué à un stade psychique de sa croissance, en suspens, en attente d’une solution.
Si l’enfant n’a pu être un enfant mais qu’il a dû guérir ses parents ou s’en occuper, alors il saute son stade d’enfant ou d’adolescent pour se retrouver Adulte ou Parent avant l’âge.
Si l’enfant a sauté son enfance ou son adolescence en raison d’un rejet affectif ou de la mésentente de ses parents ou séparation, divorce, il restera fixé, cloué sur place à son stade psychique et cherchera à régler plus tard son problème vis-à-vis de son conjoint (pour combler les manques).
Le conjoint deviendra alors l’idéal masculin ou féminin (du père ou de la mère que l’Enfant n’a pas eu ou qu’il se représente), un conjoint « thérapeute », un parent « magique ».
L’état du moi Enfant de l’enfant se branche profondément et inconsciemment à l’état du moi Enfant du parent et si celui-ci n’est pas guéri, sain, alors il va affecter l’état du moi Enfant de l’enfant.
Exemple : un enfant va être affecté par la maladie physique ou psychologique d’un de ses parents, et inconsciemment va prendre la décision de guérir son parent.
Si la relation est saine: alors elle sera heureuse, portée par le désir d’être ensemble et de partager.
Si la relation est malsaine: alors elle sera perturbée, nocive puisqu’il y aura confusion des rôles, l’enfant deviendra le soignant du parent.
Un bon père ou une bonne mère pour moi est un parent capable de vivre par et pour lui-même, en son nom propre, de façon Adulte, différenciée et autonome. Le bon parent n’a pas besoin de son enfant pour se sentir vivant, bon et utile, aimé et aimant.
Je finirai en vous citant ce texte de Khalil Gibran, Le prophète :
Et une femme qui portait un enfant dans les bras dit,
Parlez-nous des Enfants.
Et il dit :
Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même.
Ils viennent à travers vous mais non de vous.
Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas.
Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées,
Car ils ont leurs propres pensées.
Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes,
Car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter, pas même dans vos rêves.
Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux, mais ne tentez pas de les faire comme vous.
Car la vie ne va pas en arrière, ni ne s’attarde avec hier.
Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés.
L’Archer voit le but sur le chemin de l’infini, et Il vous tend de Sa puissance pour que Ses flèches puissent voler vite et loin.
Que votre tension par la main de l’Archer soit pour la joie ;
Car de même qu’Il aime la flèche qui vole, Il aime l’arc qui est stable.
Khalil Gibran, Le prophète.
Chaleureusement
Christophe GEORGIN
http://www.libreavecsoi.com