Du Féminisme

Les débats autour du féminisme sont de plus en plus
forts et confus. Mes notes suivantes n’expriment que mon point de vue subjectif
et ma compréhension vis-à-vis du concept et son utilisation.

 

Du Féminisme ou des Féminismes

 

Au fait, parlons-nous du Féminisme au singulier ou
plutôt des Féminismes au pluriel ?

 

De mon point de vu, le mouvement féministe ne consiste
pas à un assemblage de théories et d’opinions parfois arrogantes. Le Féminisme
– et je suis loin d’en parler à la place de ces femmes qui ont bouleversé les
paradigmes patriarcaux qui ont géré le monde depuis des milliers de siècles. La
prédominance masculine a été touchée dans son égo le plus profond. Le confort
patriarcal a vu ses fondements s’écrouler l’un après l’autre pour finir par
admettre que sans conforts féminin, il n’y’aurai jamais le confort masculin.
C’est un principe dorénavant basé sur le « gagnant/gagnant ». Mais là, ce n’est
pas fini. La résistance au changement est plus forte que ce qu’on puisse imaginer,
étant basée sur les paradigmes constituant une culture patriarcale ancrée dans
le tréfonds de l’humanité autant chez les hommes que chez les femmes.

Effectivement, la société – ou les sociétés –
patriarcale est construite par les femmes aussi. Elle est défendue par les
femmes, parce que celle-ci, inconsciemment sont esclaves de paradigmes
patriarcaux.

 

Donc, Féminismes ou Féminismes ? La question ne se
pose à ce niveau, à mon avis. La question se pose plutôt au niveau des
principes, des valeurs et des référentiels intrinsèques au concept du Féminisme
et son idéologie de base.

 

Principes et valeurs intrinsèques au Féminisme

 

Pour appréhender le dilemme « du Féminisme ou des
Féminismes », l’on devra regarder du près les fondements de base et les valeurs
sous jacentes du mouvement féministe.

 

1. Le premier fondement est que le mouvement féministe
fut né du refus des conditions dans lesquelles les femmes vécurent. Cette prise
de conscience constitua un « Eveil » ou une « mise en cause » de la condition
des femmes dans les sociétés où la prédominance était accordée aux hommes par
les hommes et, à force de la prise des paradigmes patriarcaux inculqués depuis
la naissance jusqu’à la mort, les femmes s’approprièrent la culture masculine
patriarcale aux dépens de leurs besoins et de leurs intérêts. L’Eveil consista
donc à se rendre compte de cette réalité. La révolte a commencé et nous
connaissons, ceux averties et avertis, le destin affreux des premières femmes
qui se révoltèrent contre le patriarcat et contre la prédominance d’un «
homme-dieu » omniprésent et omniscient. C’est le besoin ressenti par les femmes
qui les poussa à réagir et s’éveiller. Leurs yeux s’ouvrirent et elles virent
la réalité affreuse de leurs conditions de vie.

 

2. Le deuxième fondement réfère à la relation de
pouvoir sous-jacente au lien entre le féminin et le masculin, le patriarcat et
le matriarcat. Dans une société où la prédominance de l’homme lui permet de
manipuler toutes les richesses et les biens de la terre. Il s’agit, bien entendu
ici des richesses et bien au sens large du terme : économiques, sociales,
politiques, culturelles, civiles, etc. La relation du pouvoir – ou le
déséquilibre de la relation de pouvoir entre les hommes et les femmes, met
celles-ci dans des situations de pauvreté chronique. Cela devait finir, à un
moment ou à un autre par se révéler à l’encontre des intérêts des femmes et
celles-ci devaient y réfléchir et reconnaitre que leur condition de vie ne les
servait pas. Cela fut le deuxième pas que les femmes devaient franchir :
chercher une relation de pouvoir équilibré et saine. La lutte commence et la
résistance masculine patriarcale devenait de plus en plus forte jusqu’à un
niveau de machisme absolu qui finit par le massacre massif des femmes depuis le
commencement de leur lutte.

 

3. Plus la lutte fut forte, plus la résistance
masculine fut aigue. Les femmes se mobilisèrent pour renforcer leur pouvoir
collectif et imposer la question féminine et les droits humains des femmes dans
les politiques, les programmes et les plans d’actions des gouvernements au
niveau mondial.

 

4. Les activistes des droits des femmes se
multiplièrent au cours du temps et la nécessité d’un cadrage fut urgente. D’où
le début de la théorisation et de la conceptualisation du féminisme. L’on
assiste ici à un processus naturel de l’évolution de militantisme féministe qui
commença par « l’Eveil » pour finir et continuer avec une idéologie bien ancrée
et proactive. 

 

Quoique les opinions se multiplient et divergent quant
au concept et l’idéologie du féminisme, les principes suivants sont
unificateurs et, soit disant, un féminisme qui ne s’inscrit pas dans ces
principes, ne pourra être que hors le féminisme dont l’évolution est décrite
ci-dessus :

 

1. La femme est mise au centre des préoccupations de
toutes les interventions féministes. La femme n’est ni sujette à une existence
préalable de l’homme, ni lui est subordonnée à l’homme. Elle ne dépend pas de
lui. L’homme et la femme sont complémentaire l’un à l’autre et ils sont égaux
dans les devoirs et dans les droits ainsi que dans les bénéfices et les
richesses de la terre. Aucune explication contraire qu’elle soit religieuse
(soi disant divine), politique, économique, sociale et culture, ne justifie la
mise de la femme à un deuxième rang.

 

2. La femme tire son pouvoir d’elle-même et non du
rôle de production qu’il l’étiquette depuis l’éternité. La femme a tout les
droit à accéder à tous les pouvoirs existants et qui sont, jusqu’à présent,
monopolisés par l’homme. La relation du pouvoir déséquilibrée, tire son essence
de la répartition des rôles entre les hommes et les femmes, ceux des ces
dernières n’étant jamais valorisés. La nature féminine de la femme et son rôle
de reproduction est erronément utilisée pour justifier le rôle de son incapacité
à rivaliser l’homme dans les domaines qu’il monopolise. La reproduction et la
production est l’affaire de l’homme et de la femme au même pied d’égalité et
aucun processus naturel ne justifie le contraire. Les stéréotypes développés et
les paradigmes formés autour du rôle des femmes et des hommes, avaient pour
objectifs de renforcer l’épanouissement de l’homme et la limitation de la marge
de manœuvre de la femme dans l’espace et dans le temps.

 

3. Si la femme accepte ses conditions, sa situation et
sa position, c’est qu’elle a été éduquée à l’être. La femme n’est pas
responsable de ce déséquilibre dans la relation de pouvoir. Il en est plutôt
victime. Le système patriarcal a réussi à domestiquer les femmes et les
annihiler. Les femmes font partie du système. Elles ne l’ont pas choisi,
quoiqu’elles croient que c’est le cas. C’est curieux de savoir que la
chosification des femmes est la base de toutes les religions patriarcales
créées par l’homme et annoncées comme interventions divines pour l’organisation
des relations de pouvoir entre les hommes et les femmes. La femme est
considérée comme un instrument utilisé pour le bien et le mal de l’homme. C’est
l’intimidation et la culpabilisation si la femme se révolte. C’est
l’appropriation et la domestication s’elle obéit. Les religions dans toutes les
cultures ont été utilisées pour ce faire pour justifier la sagesse de la femme
à accepter e vivre ses conditions, sa situation et sa position telles que
l’homme les a prescrites.

 

4. La femme est responsable de ces actes, parce
qu’elle a la capacité complète de prendre des décisions judicieuses dans sa
vie. Elle n’a pas besoin que l’homme prenne les décisions à sa place. Quand
c’est le cas, c’est la tutelle qui puise ces fondements dans l’infériorité
supposée de la femme. Cela nous réfère au processus de l’estime de soi. L’homme
se sent en sécurité en mettant la femme dans une situation de dépendance.
L’autonomie de la femme constitue un risque à son pouvoir patriarcal au niveau
individuel et collectif et dans tous les domaines politiques, économiques,
sociales, culturelles, civils, etc. Le système éducatif intimidateur et
dévalorisant du statut de la femme, élaboré en toute pièces par l’homme
contribue à cristalliser son niveau d’estime de soi très faible depuis sa naissance.

 

5. Les femmes doivent récupérer leur pouvoir et
l’imposer sans chercher à le justifier et le prouver. Cela ne veut en rien dire
qu’elles doivent chercher leur pouvoir chez les hommes ou le leur dérober. Cela
veut dire que les femmes ont beaucoup d’effort à fournir pour changer les
paradigmes patriarcaux, sources de leurs « Dés-pouvoir ». Les paradigmes
réfèrent aux idées, croyances et pratiques prédominantes dans la société. Ils
sont par essence patriarcaux et touchent à tous les domaines de la vie :
politiques, sociaux, économiques et culturels. Dans une dynamique non
démocratique, les femmes sont les premières à payer le prix aux dépens de leurs
santés physique, psychique, mentale et spirituelle. Un système social non
démocratique et qui n’est pas basé sur des principes de leadership démocratique
et équitable ne peut générer que des relations inégalitaires et injuste entre
les hommes et les femmes. Dans un tel système, le Féminisme doit, à tout prix,
refuser, soi-disant, la liberté de l’expression qui va à l’encontre du respect
de l’intégrité humaine de la femme. Parce que dans une dynamique patriarcale
prédominante, le processus ne peut être que dictateur et totalitaire aux dépens
de l’intégrité de la femme. Toute représentation égalitaire proposée par les
femmes ne peut y être que rejetée, voire opprimée. Le Féminisme doit considérer
que la réalisation de la pleine égalité dans un tel système, ne peut être que proportionnelle
du degré de l’existence des paradigmes anti-égalitaires pro-patriarcaux.

 

A la lumière des ces principes et valeurs, tout Féminisme
incohérents avec eux, ne peut pas être du Féminisme. Les cas sont nombreux.
L’exemple des femmes islamistes, soi-disant féministe, ne pourraient prétendre
être en cohérence avec ces principes et valeurs. Des femmes féministes considérant
que la femme est responsable de sa situation d’infériorité et de subordination,
et que ce qui lui arrive, c’est de sa faute, parce qu’elle n’a pas le courage
de le dénoncer ; ne peuvent pas faire partie du Féminisme basé sur ces
principes et valeurs.

 

A mon avis, l’on ne peut pas parler des « Féminismes »
au pluriel. Pour la simple raison qu’il n’en existe qu’un. Celui basée sur ces
principes et valeurs. Le dilemme de plusieurs ou d’un féminisme est imaginaire
ou provient de la non compréhension, de l’interprétation, de
l’instrumentalisation et/ou d’un jeu de récupération du discours Féministe et
de son évolution. Ce dilemme est inventé pour diluer les principes et les
valeurs fondamentaux du «Féminisme».

 

Abderrahim AMRAOUI

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