Un rapport de l’ONU sur la noyade des demandeurs d’asile mérite d’être salué, une enquête similaire devrait être menée sur l’incident de 2014

LESBOS ISLAND, GREECE - NOVEMBER 02: Refugees hoping to cross into Europe, arrive on the shore of Lesbos Island, Greece on November 02, 2015. (Photo by Ayhan Mehmet/Anadolu Agency/Getty Images)

Genève – Un rapport de la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies a tenu l’Italie responsable de ne pas avoir respecté l’obligation de protéger plus de 200 demandeurs d’asile, dont 60 mineurs, qui se sont noyés après que leur bateau ait coulé au large des côtes italiennes en octobre 2013. L’Observatoire Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme a salué le rapport dans un communiqué jeudi.

Dans des lettres urgentes, Euro-Med Monitor a demandé à la commission de l’ONU d’ouvrir une enquête similaire sur le naufrage d’un bateau transportant des demandeurs d’asile, pour la plupart des Palestiniens, en septembre 2014. L’incident était connu sous le nom de bateau Damietta. Les responsables du naufrage doivent être tenus pour responsables et les parties qui n’ont pas réussi à sauver les passagers, à récupérer leurs corps ou à ouvrir une enquête sérieuse sur ce crime.

Euro-Med Monitor a mené plusieurs enquêtes sur l’incident qui ont conclu que le bateau parti des côtes égyptiennes alors qu’il transportait 400-450 personnes, dont une centaine de mineurs, a été délibérément noyé.

Un rapport du procureur général de Sicile de 2017 a confirmé l’enquête d’Euro-Med Monitor, qui a exclu les chances d’autres survivants que les dix cas documentés à l’époque.

Le rapport de la commission, sur l’accident d’octobre 2013, publié hier, a conclu que l’Italie n’avait pas répondu rapidement aux appels de détresse du bateau. Le bateau transportait plus de 400 demandeurs d’asile, dont des femmes et des enfants.

Le rapport indiquait également que l’Italie n’avait pas expliqué le retard dans l’envoi de son navire ITS Libra, qui se trouvait à environ une heure du lieu de l’accident, pour secourir les demandeurs d’asile.

Euro-Med Monitor avait révélé dans un rapport qu’il avait publié sur la même affaire en octobre 2013 que les autorités italiennes n’avaient pas réussi à secourir les demandeurs d’asile palestiniens et syriens dont le bateau s’était écrasé près des côtes italiennes. Les autorités n’ont même pas réussi à récupérer les cadavres pour les enterrer de manière décente et mener une enquête sur l’incident.

Suite à l’accident, Euro-Med Monitor a organisé un séminaire au Parlement Européen en novembre 2013. Il a présenté un rapport d’enquête sur l’incident. Le séminaire a conclu que l’une des causes les plus importantes de l’accident est le temps perdu dans l’échange d’informations, la coordination et la communication entre les autorités italiennes et maltaises malgré l’émission de signaux de détresse graves par le bateau qui a coulé pour demander de l’aide.

En 2014, Euro-Med Monitor a coopéré avec le programme d’enquête néerlandais Zembla sur un film d’investigation et a recueilli des témoignages sur l’incident. L’équipe du film a discuté du rapport avec plusieurs membres du Parlement européen à Strasbourg.

De son côté, Mohammed Shahada, directeur régional pour l’Europe d’Euro-Med Monitor, a considéré le rapport du comité des Nations unies comme un premier pas vers la responsabilisation de ceux qui n’ont pas réussi à sauver des demandeurs d’asile en mer et à freiner les refoulements illégaux des pays européens.

Mohammed Shahada a déclaré que les autorités italiennes sont obligées de tenir pour responsables tous les responsables du naufrage du bateau en octobre 2013. L’Italie est partie à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS) de 1982, à la Convention Internationale sur la recherche et le sauvetage maritimes (SAR) de 1979 et à la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) de 1974. Toutes ces conventions obligent les États parties à sauver les vies menacées par la noyade.

Les autorités italiennes devraient prendre au sérieux le rapport du Comité des droits de l’homme des Nations unies et traduire toutes les personnes impliquées dans l’incident en justice, qui affirment depuis longtemps dans le cadre de leurs jugements que toute personne en danger doit être sauvée.

L’UE devrait mettre fin aux processus d’interception et de renvoi des demandeurs d’asile vers des pays peu sûrs, tenir pour responsables les pays impliqués dans les violations des droits des migrants et des demandeurs d’asile, et établir un mécanisme de surveillance des violations des frontières extérieures de l’Union.

L’UE devrait également adopter une nouvelle politique qui tienne compte de la dimension humaine dans le traitement de la question de l’asile et de l’immigration, en soulignant que toute préoccupation en matière de sécurité ne justifie pas de laisser des milliers de migrants et de réfugiés vulnérables à la noyade pendant leur voyage.

Contexte

Le Comité des droits de l’homme est un organe des Nations Unies qui comprend 18 experts indépendants. Ce comité a été créé en vertu du Pacte International relatif aux droits civils et politiques.

Le comité se réunit en trois sessions par an pour examiner les rapports quinquennaux soumis par les 172 États membres sur leur conformité avec le Pacte International.