Marine Le Pen, le début de la fin du leurre ?

Ces dernières semaines, la candidate du Front National semble accuser un déficit de crédibilité important auprès de l’opinion populaire. Alors qu’elle était créditée d’environ 20% d’intentions de votes au premier tour par la majorité des sondages, ces derniers remettent  aujourd’hui complètement en question le potentiel électoral de la candidate ; celle-ci accuse désormais une chute relativement importante selon les instituts de sondages (-3,5%, sondage IFOP). Quid de ce déclin inopiné, mais un tant soit peu, prévisible ?

Il y a quelques mois, il ne faisait quasiment aucun doute que Marine Le Pen serait au second tour ; la candidate était même parvenue à atteindre des pointes d’intentions de vote historiques, en août 2011 (22% – 23%, sondages IFOP). Aujourd’hui, cette certitude est complètement remise en cause. Certains l’attribuent au retour affirmé de François Hollande sur la scène médiatique, depuis quelques semaines, dans le cadre de sa campagne électorale. D’autres tablent sur l’omniprésence grandissante du président sortant, Nicolas Sarkozy, dans le paysage politico-médiatique. En réalité, la candidate extrémiste s’est elle-même coupé l’herbe sous le pied…A commencer par sa participation à ce fameux bal autrichien. Il s’agissait, en effet, d’un bal organisé par le parti de l’extrême-droite autrichienne, le FPO, dont le leader Heinz-Christian Strache assume, affirme, voire revendique son islamophobie et son antisémitisme. Il faut souligner que ce parti, très populaire en Autriche, – 27% des voix lors des élections législatives de Vienne d’octobre 2007 -, participe à l’émergence des nationalismes en Europe –similaire à celle de l’entre-deux guerre -, et s’avère être dangereux. pour le corps social démocratique et droit-de-l’hommiste européen. Le leader du FPO sus-cité n’a en effet jamais dissimulé son passé néo-nazi, et milite clairement pour l’éradication pure et simple de l’islam en Autriche…

Outre cette « mésaventure » que Marine Le Pen a peiné à assumer, prétextant ignorer la présence de groupuscules extrémistes et néo-nazis durant ce bal, c’est sur les plateaux de télévision que la candidate du Front National s’est le plus décrédibilisée. En début de semaine, la fille de Jean-Marie Le Pen a frontalement agressé la journaliste Ruth Elkrief sur le plateau de BFM TV, arguant que la journaliste et son équipe n’avaient pour objectif que d’avantager la campagne de Nicolas Sarkozy, au détriment de la sienne. Madame Elkrief a immédiatement rétorqué que le meeting du Président Sarkozy et que celui de Marine Le Pen avaient lieu simultanément, et que, par conséquent, il fallait faire un choix entre la diffusion de celle de Monsieur Sarkozy et la sienne. Il faut dire que la disproportion entre l’adresse et la justesse de ton de Ruth Elkrief, et l’invective et l’agressivité ad hominem de Marine Le Pen, ont laissé perplexe, voire choqué plusieurs téléspectateurs et internautes. Ce n’était pas sans rappeler le même ton que la candidate avait employé en décembre 2010, pour comparer les prières de rue des musulmans, à une forme d’ « Occupation »…

Quelques jours plus tard, la candidate du Front National renouvelle cette même irascibilité. Sur le plateau d’I-Télé cette fois-ci. Elle qualifie un journaliste, d’une ironie cinglante et déconcertante, de « chaton qui coure après la ba-balle », alors que celui-ci ne faisait que l’interroger sur sa position vis-à-vis du discours que son père avait tenu quelques jours plus tôt en mentionnant Robert Brasillach, un auteur collaborationniste de la Seconde Guerre Mondiale. Ici encore une attitude irrespectueuse et inadéquate que beaucoup n’ont pas compris. Certains estiment qu’ « alors qu’elle avait fait une bonne émission chez Ruquier où elle s’était montrée calme et en débat avec les gens, elle se retrouve « le lendemain » (même si l’émission était tourné le mardi) sur deux chaînes d’infos, totalement agressive, avec un sourire digne d’Alcapone ». D’autres ironisent et pensent que la candidate « avait ses menstruations »…Il faut ajouter que, durant cette interview, la candidate a osé chantonner l’extrait d’une des plus grandes chansons du répertoire de notre défunte et illustre artiste, Dalida…Malheur. Sacrilège. Dieu lui pardonne. Amen.

Quoi qu’il en soit, ce n’est guère sur ces plateaux que Marine Le Pen a mis le plus à mal sa crédibilité. C’est sur celui de David Pujadas, Des Paroles et des Actes, sur France 2, que la candidate extrémiste a fait grimper son taux de ridicule à son paroxysme. Alors que le débat avec Henri Guaino, conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, s’était plutôt sereinement déroulé, Marine Le Pen change complètement d’attitude face à Jean-Luc Mélenchon, prétextant dans un orgueil plus que démesuré, que ce dernier n’est pas un candidat à sa hauteur dans les sondages. La candidate semble omettre – ou ignorer – qu’en raison d’un regain de crédibilité et de popularité auprès de l’opinion populaire, le Président du Front de Gauche connait désormais une nette progression dans les derniers sondages (9,5% selon le sondage TNS Soffres du 29 février). Autrement dit, un magnifique un coup d’épée dans l’eau pour Marine Le Pen. On aurait pu espérer qu’au fil des minutes, cette dernière changerait tout de même de comportement, en bonne candidate à la présidentielle. En candidate adulte, raisonnée, courtoise, exemplaire. Mais, que nenni ! La  présidente du FN a persisté dans son attitude, somme toute, puérile, admettons-le d’emblée… Au moins, a-t-elle le mérite de n’avoir rien à envier à enfants de 8 ans dont l’entêtement peut s’avérer très acharné ! Il n’en demeure pas moins que la candidate du Front National a refusé jusqu’au bout tout échange avec Jean-Luc Mélenchon, le qualifiant même de « leurre »…Mais n’est-ce pas « celui qui dit qui est » ?

Il semble donc bien que, ces dernières semaines, ce soit Marine Le Pen qui ait elle même amorcé son propre déclin. En montrant son « vrai visage », la candidate à la présidentielle semble avoir perdu le contrôle de sa campagne électorale et la poursuite rigoureuse de son objectif de dédiabolisation. Il est toutefois important de souligner que certains éléments périphériques et extérieurs à son action directe semblent lui nuire, contre son gré : la récente condamnation de son père par la justice, pour avoir déclaré que l’Occupation n’avait pas été « particulièrement inhumaine » ; ou encore, dernièrement, et de manière plus importante, la récente agression du couple Pulvar-Montebourg par des partisans du Front National…Et la candidate persiste, contre vents et marées, à affirmer – à qui veut bien toujours l’entendre – que son parti n’est nullement extrémiste et profondément républicain…Ne serait-ce pas là le genre de contre-vérité honteux et incohérent qui risque bien d’anéantir définitivement toutes les chances pour la candidate d’espérer accéder au pouvoir ?