Homme battu : un jeune homme de 19 ans témoigne de son enfer

Homme battu : un jeune homme de 19 ans témoigne de son enfer

Si vous avez lu ma chronique « Le couple et le permis de conduire à points », vous avez compris qu’il n’est pas normal de perdre ces fameux points au fur et à mesure que le temps passe et que le ménage bat de l’aile. Bien au contraire ! Vous devriez les multiplier grâce à l’amour, la complicité et l’historique qui se créent entre vous. Je viens de rencontrer, en coaching, un jeune homme qui, lui, a gagné de nombreux points dans son couple, de 17 à 19 ans… des points de suture ! Celle qu’il trouvait « trop belle » et qu’il croyait ne pas « mériter » lui a, entre autres, ouvert la tête avec de la vaisselle puis le bras avec un couteau. Résultat : 13 points de suture en tout et 9 cicatrices sur tout le corps, sans compter les yeux au beurre noir (la douce le frappait à coups de poings à la moindre occasion), elle l’a trompé avec son meilleur ami, fait embarquer 6 fois au poste de police, il s’est retrouvé une fois en maison de transition et deux fois en prison. Un ange… de l’enfer, cette petite !

Ce jeune adulte était tout simplement un homme battu, rattaché à son bourreau par la dépendance affective, incapable de lui résister et, surtout, terrifié à l’idée de riposter lorsqu’elle l’agressait : ça n’est pas correct de frapper une fille et il avait peur qu’elle le fasse embarquer par la police. C’est pourtant ce qu’elle faisait, dès qu’il ne se soumettait pas. Par peur de la perdre (encore et toujours la peur !), il s’est refusé à avouer que c’est elle qui l’avait blessé avec un couteau ou à la tête, bien que la police, pas dupe, avait compris toute l’histoire. Au poste, il était presque devenu un habitué (au bout de 6 fois !) et aucune charge n’a jamais été retenue contre lui, malgré les plaintes qu’elle portait, autant de coups d’épée dans l’eau, qui l’ont tout de même envoyé en prison.

N’allez pas croire que ce garçon soit un délinquant : bon élève, sportif (il pratiquait le biathlon), beau mec, avec une famille très présente, il avait une vie saine et équilibrée. Jusqu’au jour où ses yeux se sont posés sur celle « qui était trop belle ». Son manque de confiance en lui envers les filles l’a poussé à être en admiration devant celle qui lui ferait connaître un petit début de paradis, pour finir en enfer. Surveillez vos enfants et vous-même : entrer dans une relation où vous mettez l’autre sur un piédestal est le début des ennuis ! Personne n’est au-dessus de vous, surtout pas une conjointe, sinon vous serez prêt à tout pour garder celle que vous trouvez tellement belle ! Je l’ai fait avec Jim, beau garçon et 15 ans de moins que moi, je me sentais flattée et me demandais quel autre jeune homme beau et sportif voudrait de moi après lui. Je l’ai laissé me faire tout et n’importe quoi, par peur de le perdre. C’est moi que j’avais perdue !

Je t’aime, je te hais, c’est toute l’histoire de la dépendance affective. Je t’humilie pour te soumettre, sans moi tu n’es rien, personne ne voudra de toi, et surtout pas une jolie fille comme moi. Et si je te frappe, c’est parce que tu m’as énervée. Mais je t’aime, tu es l’homme de ma vie ! Et hop, un petit coup de sexe par-dessus tout ça, emballé, c’est pesé ! On repart pour un tour, dans le cercle vicieux de l’horreur. Bien sûr qu’il a essayé de la quitter, mais elle revenait le chercher suppliante, adorable, craquante et offerte. Comment résister ? Elle était « trop belle »… L’homme frappé ne peut pas se défendre, prisonnier de son éducation (sa mère lui a appris à respecter les femmes), terrifié de se retrouver au poste (la peur du policier) et au tribunal (l’engrenage de la justice injuste) et ligoté par la dépendance affective : il se laisse frapper, il se tait.

Bien sûr, une fois de plus, vous allez juger hâtivement : c’est un lâche ! Pas plus que celui qui a une compulsion à l’alcool, la drogue, le jeu : c’est une dépendance. Et cessez de me dire « il n’a qu’à s’en aller ! ». Si je vous emmène en haut du Grand Canyon et je vous place sur le bord du précipice. Je vous dis ensuite : « Je te frappe ou tu sautes ». Que faites-vous ? Vous endurez les coups. Parce que pour la personne en dépendance affective, quitter l’autre, c’est sauter dans le vide et crever. « Méfiez-vous des jugements trop hâtifs », comme disait Jean de La Fontaine ! Vous qui vous moquez de ces personnes en attachement névrotique, nous verrons bien ce que vous ferez, le jour où l’autre vous quitte… Peut-être que vous ramperez, prêt à vous avilir pour la garder. D’ailleurs, réfléchissez, c’est peut-être vous qui devriez la quitter. Il n’y a pas que la violence physique, la violence psychologique, frappe aussi !

Le manque de confiance et d’estime vous pousse à accepter l’inacceptable, par peur du vide affectif créée dans l’enfance et qui grandit chaque jour. Réveillez-vous, vous valez mieux que ça ! Vous ne méritez pas, personne ne mérite le malheur. C’est le résultat de mauvaises programmations, que vous pouvez déprogrammer. En revanche, le Bonheur, lui, se mérite car c’est un chemin qui se choisit. Et si les hommes qui frappent, les femmes peuvent au moins appeler la police. Certaines l’appellent d’ailleurs trop facilement, c’est un chantage, une menace pour tenir, soumettre celui qui nourrit leur névrose. Imaginez : la police au service des névrosées !

Venant de France, je suis obligée de réagir devant ce matriarcat, au Québec, qui soumet les hommes. Rétablissons ensemble l’égalité, dans un monde où personne n’a le droit de frapper ni de menacer, mais où tout le monde a le droit d’appeler la police, dès qu’un début de violence s’installe, au lieu de régler cela soi-même. Vous le savez, je me battais avec mes conjoints (lire « Le syndrome de Tarzan ») et  l’arcade sourcilière fendue ou la lèvre éclatée, c’était pour moi bénin. Jusqu’au jour où j’ai compris, au dernier round avec Jim, que la police est formée à intervenir avant que le sang coule ou que l’un des deux y reste. C’est moi qui attaquais et eux n’étaient pas des hommes battus, mais des hommes qui ripostaient. Pas Québécois, Français.

Personne n’a le droit de vous frapper et vous n’avez le droit de frapper personne. Mais ne restez pas dans le silence, même si la dépendance vous a enchaîné à une femme déséquilibrée (comme je l’étais moi-même !), communiquez avec une ressource extérieure, appelez un coach qui vous guidera pour vous libérer. C’est une mauvaise programmation. J’ai beaucoup de clients qui ont été frappés et ont décidé de sortir de cet engrenage. Ils en sont sortis et ne sont pas prêts d’y retourner : leur détecteur de névrosées est devenu extrêmement sensible !

Vous n’êtes pas seul, vous êtes des milliers à être frappés. Ce n’est pas, comme le pensent certaines femmes, un juste retour des choses. Un homme, une femme violents n’ont rien de civilisé. Ce jeune homme et moi allons écrire sa vie, car il veut témoigner. Aujourd’hui, il est sorti de prison et de la dépendance. Il se trouvait « cave » quand je l’ai vu la première fois. Maintenant, il veut que son histoire en guide d’autres vers la sortie. Cette fille n’a plus d’emprise car il s’est pardonné, comprenant qu’il était en dépendance. Il lui a pardonné, comprenant qu’elle est en souffrance et en déséquilibre (ce qui ne constitue pas une excuse à ses actes de violence, mais une explication). Quant à sa cicatrice boursoufflée sur le bras, elle n’est plus un handicap qu’il cache : c’est le symbole d’une belle victoire sur la vie et sur la dépendance !

Surveillez la sortie du livre et en attendant, lisez « Le syndrome de Tarzan » (Béliveau éditeur) !

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Pascale Piquet

Auteure et conférencière

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