Voyage au bout de ma ville. Vilnius

Est-il possible de faire un voyage dans la ville qu’on habite, où l’on a vécu toute la vie et où l’on va, probablement, mourir?  Comment faire ce voyage de découverte sans avoir la hideuse sensation: je connais déjà tout par cœur?

On a beau essayer de découvrir le proche et non le lointain, apprendre à connaître la ville que l’on habite, il me semble, depuis l’éternité. Ma ville c’est Vilnius. La capitale de Lituanie. Jérusalem de Lituanie. La ville désirée des polonais. La ville à plusieurs faces et à plusieurs cultures. La ville avec ses églises baroques et ses oignons orthodoxes où se mêlent arrogante architecture stalinienne et les façades contemporaines.

Ma ville est située au confins des mondes – entre l’Europe la moderne et la vaste Russie. Tout au bout de l’Europe Nord-Est, dernier arrêt. Je suis persuadée – vous n’en avez jamais entendu parler, le nom de Vilnius est sans aucune signification à vos yeux et à vos oreilles. A moins que vous soyez un de ces rares voyageurs qui privilégie les découvertes sobres à la mode folle des plages et du beau temps.

Dans ma ville il pleut souvent. Et s’il ne pleut pas, il neige. Et s’il neige pas, alors il y a du soleil. Le temps capricieux laisse apercevoir les différentes faces et dévoile les aspects inattendus.

Sous le soleil, éclate le jaune, le blanc, l’or des églises et noient les yeux dans la mer profonde du bien être. Le moindre recoin est envahie par la verdure des arbres et du jasmin. Le Soleil brûlant et l’ombre fraîche. C’est l’été.

Septembre colore les feuilles. Dans le rouge, le brun, le jaune, vert foncé se perdent les toits, les murs, les promeneurs, les terrasses… De toute la ville, il ne reste que le vent et ces couleurs. L’ ultime baiser de l’été sous le soleil encore présent. Au fur et à mesure, il cède la place au sombre.

Le gris. La pluie. Ceux là invitent à abandonner les allées piétonnes, les rues larges et bien éclairées et se perdre dans les labyrinthes des petites ruelles et des cours sombres combinés des cabanes en bois vermoulu et abritant les merveilles de la vie locale. Le temps lui-même, grisâtre, pluvieux et morne, supplie d’abandonner ces façades bien cirées par les fonctionnaires du tourisme et de foncer dans les entrailles de la ville, parfois sales, en ruine,  visqueuses. Plus de soleil: Plus de couleur. Que du gris et même l’or des églises disparaît dans cette grisaille ambiante.

Et puis la neige tombe. La blancheur. L’air gèle. Moins dix, moins vingt, parfois encore moins. Tout tombe. Toute la vie semble s’arrêter. La neige crisse sous les pieds. Le nez colle et il n’y a plus que les yeux des passants. Le soleil est si bas qu’il touche la ville endormie. On passe prendre du thé très très chaud avec de la vodka afin de se dégourdir les doigts des pieds et le bout du nez.  Les joues deviennent écarlates, les yeux brillent. On fonce de nouveau dans le froid pétrifiant. La ville est blanche. Comme si un drap très frais et très propre avait tout recouvert.

Puis, peu à peu la blancheur redevient grise, avec les traces de pise de chien, du sable et de la terre. Le printemps entre dans la ville.  Elle change sans jamais changer vraiment.

Avez-vous déjà essayé d’observer votre ville, de sentir ses humeurs, de la voir verdir puis blanchir de nouveau, de voir les rues se remplir puis se vider… Comment est-elle?  Je vous invite de partager vos impressions.
et vous promets des images de ma ville très bientôt :) …

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