Monsieur Akli

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L’été s’annonce chaud dans la commune de Toudja, au nord de Bejaia en Algérie et les heures à éviter se situent entre 12h et 15h, car les coups de soleils sont impitoyables durant cette tranche d’horaire.


A Toudja, le réveil se fait matinal et dynamique, son air est pur et l’eau de source coule dans ses robinets domestiques.

Le matin, les toudjistes sortent pour s’aérer, mais dès midi tapant, ils rentrent chez eux pour déjeuner et faire la sieste.

Mais lui, il est toujours là à défier les rudes rayons du soleil de midi, en ignorant toutes les consignes, il marche comme à son accoutumée, dans cette chaleur que seul un méchant peut supporter.

Il est maigre et sa maigreur ne présage rien de bon, des sillons disgracieux sont tracés sur son visage noirci par les rayons solaires, cumulés durant les heures interdites. Il n’aime personne et personne ne l’aime.

Sur son regard impitoyable, il porte un grand chapeau de paille fabriqué de ses propres mains.

Au-dehors, il vit seul, mais à l’intérieur nul ne sait, car son épouse s’est volatilisée depuis une décennie et l’on ignore ce qu’elle est devenue. Crime crapuleux ? Mort naturelle? Fuite ? Suicide ?

Il ne se soucie guère des regards indiscrets des villageois et chaque jour, il se pavane, en portant autour de sa taille une grosse cravache fabriquée avec la queue de la seule vache qui avait bien voulu lui tenir compagnie durant ces dernières années. Certains s’amusent même à dire que cette femelle avait remplacé la maîtresse de maison, portée disparue depuis belle lurette.

Un jour, monsieur Akli s’est arrêté devant une petite fille qui marchait en tenant un vieux panier usagé, elle portait des sabots plus grands que ses petits pieds abîmés et ses vêtements démontraient qu’elle était issue d’une famille pauvre.

Il s’est approché d’elle en la regardant affectueusement, il lui parlait, elle lui répondait, il souriait, elle riait. C’était incontestable, le loup avait charmé l’agneau.

Deux heures après, deux voitures de police brondissaient vers le centre du village, la petite fille avait disparu…

Des policiers descendus en masse, se sont approchés de l’estaminet du coin pour poser des questions et ont regagné ensuite leurs véhicules dont les vroom vroom se faisaient de plus en plus bruyants. Ils allaient forcément vers un seul endroit, la demeure de monsieur Akli, le kidnappeur…

Arrivés près de l’habitat du ravisseur, les agents de l’ordre ont foncé droit devant le grand portail noir en fer forgé, aussi froid que son propriétaire.

A l’intérieur, Monsieur Akli était assis paisiblement, il fabriquait un panier en osier et à ses côtés se tenait une petite fille plus heureuse que jamais.

Plus loin, sur un lit, une femme allongée et visiblement paralysée par la maladie.

L’attendrissant monsieur Akli avait invité la petite fille pour lui offrir un panier neuf, en attendant l’ouverture de l’épicier du coin.

Et la cravache ?

Un souvenir de sa bonne vache, emportée par une maladie bovine.

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